L'art de Séparer la Substance du Superficiel et de Trouver la paix avec Nous-mêmes

par Angela A.
Traduction de Michèle-Anne Roncières

Je suis membre de nombreuses sections de Tri-Ess, aussi bien que de l'organisation nationale. je vais aussi à l'occasion dans des rencontres de groupes "libres" ailleurs que dans Tri-Ess. La plupart des soeurs qui ont fréquenté un peu la communauté savent ou soupçonnent qu'au moins une certaine partie d'entre-nous qui prétendent être des travestis sont en réalité des transsexuels. Les raisons pour lesquelles nous nions notre transsexualité sont nombreuses etvariées. Beaucoup d'entre nous se considérent comme "inopérables" et/ou incapables d'être femmes " à plein temps " en raison des responsabilités que nous nous sentons à l'égard de nos proches dont nous ne voulons sacrifier ni le bonheur ni la sécurité, même si cela signifie que nous devons nous mentir à nous-mêmes; dans de tels cas nous pouvons nous trouver mal accueillies dans les groupes TS qui s'occupent exclusivement d'aider les soeurs en transition.

Lorsque nous ne sommes pas capables de subir une transition pour des raisons économiques ou autres, nous nous sentons plus à l'aise dans les groupes de travestis où nous pouvons régulièrement exprimer notre vraie personnalité et nous amuser un peu sans devoir faire face à la réalité des autres soeurs TS qui font clairement cette transition que nous désirons désespérément sans pouvoir l'envisager (la jalousie est une maîtresse particulièrement cruelle).

Ou bien il se peut que nous ne sommes tout simplement pas encore prêtes à accepter la pleine vérité de ce que nous sommes vraiment (aprè tout, qui parmi les Transgenres n'a pas perdu des années à se mentir pour éviter la confrontation avec une vérité trop douloureuse ? - nous avons toutes cheminé de travers sur cette route là). Pour cette raison, dans chaque groupe de Transgenres ("libre " ou de Tri-Ess), il y a certainement au moins un ou deux membres TS prétendant être travestis, luttant et souffrant seuls en dépit de l'affection et du soutien de leurs soeurs. Ce sont ces soeurs, encore plus isolées, que je souhaite réconforter et auxquelles j'adresse cet article en premier lieu, bien que toutes les soeurs travesties et transgenderistes (c'est à dire celles qui vivent en femme à plein temps sans envisager d'opération) puissent trouver quelque consolation dans les réflèxions que j'exprime ici.

Une des choses les plus remarquables dans la sous-culture transgenre est l'incroyable vitesse avec laquelle nous pouvons tisser de profonds liens d'amitié avec une personne que nous ne connaissons que depuis très peu de temps. Ce phénomène singulier se produit dans l'armée, dans les prisons, les professions où les gens travaillent de longues heures dans la promiscuité, séparés de ceux qu'ils aiment, souvent dans des conditions de grand stress physique et émotionnel, et quelquefois quand la vie ne tient qu'à un fil. Il semble que partager l'adversité tende à construire rapidement des liens solides entre les gens. Que nous soyons TV, TG ou TS, chacune de nous dans cette sous-culture partage un fardeau commun, qui ne diffère que de son poids - devoir jouer ce que nous ne sommes pas, présenter au monde la façade de " virilité " que la société exige de tous les enfants nés avec la configuration XY dans leur 23ième paire de chromosomes.

Notre empathie envers les unes les autres est ce qui rend nos groupes si chaleureux, agréables et en fait des endroits accueillants où passer le temps. Nous avons toutes traversé des enfers similaires, et partageons pour cette raison-là une intuition spéciale de la façon dont nos soeurs se sentent et que même le meilleur, le plus sympathique, le plus bienveillant des professionnels ne possèdera jamais (à moins qu'il ne soit lui-même un Transgenre). Et pourtant, la soeur TS qui se prétend TV est toujours si terriblement seule qu'elle est incapable de partager la vérité complète sur elle-même avec quelqu'un d'autre, et spécialement si elle se sent en permanence piègée dans sa situation sans aucun espoir d'en sortir. Si elle est incapable de trouver la paix avec elle-même, elle continuera de vivre dans une agonie émotionnelle croissante; la joie de vivre l'évitera pour toujours; et elle pourrait bien se trouver dans un situation de sérieux risque suicidaire.

J'écris ceci pour insister sur le fait qu'il N'Y A PAS à choisir entre la transition, la vie en enfer et la mort; il est possible de trouver la paix et le satisfaction en nous-mêmes, même si nous ne pouvons pas vivre en permanence selon notre vraie nature. Je ne proclame pas qu'il est facile de trouver cet équilibre, sinon ce serait toujours la règle, mais il PEUT être réalisé. Pour que je puisse vous aider, comprenez d'où je viens et, s'il vous plaît, laissez-moi vous raconter cette histoire vraie.

A une réunion de section de Tri-Ess, voici quelques temps, je fus si profondément émue par le chagrin d'une soeur, et ennuyée de mon incapacité à la réconforter, que j'ai été amenée à réexaminer en profondeur mes propres conceptions de l'identité de genre acquise et des mécanismes d'imitation. C'est de cela que traite cet article. J'étais membre de la section depuis plus de six mois et embrassais joyeusement l'acceptation chaleureuse et la camaraderie de notre sororité. C'était si bon de ne plus lutter seule ! C'était ma deuxième réunion de section et seulement ma troisième ou quatrième apparition en femme en public. Il était plus de minuit et le hall de l'hôtel qui hébergeait la rénion venait de fermer, amenant la fin d'un autre fabuleux week-end passé en femmes. Cette soeur et moi nous regagnions nos chambres, bavardant joyeusement sur nos aventures de ce week-end, et regrettant qu'il s'achève.

L'atmosphère changea brusquement quand nous nous retrouvâmes seules dans l'ascenseur. Nous parlions alors de la difficulté de retourner à nos rôles masculins après avoir apprécié la liberté d'une vie en femme ces derniers jours. Sa douleur et son besoin de la partager avec quelqu'un devait être considérable car elle détourna soudain le regard, le dirigea vers le sol et, d'une toute petite voix poignante dit " Personne ne le sait ici, mais en fait je suis transsexuelle. " Je n'étais absolument pas préparée à une telle révélation ! Bien que nous ne nous connaissions pas depuis longtemps, nous avions rapidement sympathisé, appr´ciant chacune la compagnie de l'autre et des liens solides se nouaient déjà entre nous. Lors de ma première réunion, quelques mois plus tôt, elle et une autre soeur m'avaient encouragée lors de ma première apparition en femme en public; chacune tenant l'une de mes mains tremblantes, comme j'hésitais, elles m'avaient forcée à sortir de la voiture pour expérimenter la première des nombreuses sorties de shopping en tant que femme et dans des vêtements de femme.

Je me sentais une grande dette de gratitude et d'amitié envers elle pour ce soutien dont j'avais tant besoin et cependant j'étais ahurie de ce qu'elle m'ait choisie comme la première à qui elle avait fait cette immense révélation sur sa personne. Après tout, elle ne me connaissait que depuis trois ou quatre jours, étalés sur deux réunions distinctes. Je me sentais honorée, ébahie, et angoissée, tout cela en même temps. Je ne sais pas -- peut-être que c'était la soudaineté et le choc de la révélation, ou peut-être que j'avais de profonds besoins de mon côté -- mais, sans y réfléchir, et d'une petite voix équivalente, je répondis "je ne l'ai jamais dit à personne, mais puisque nous partageons des secrets, eh bien c'est ce que je suis aussi ! " Elle se tourna vers moi, et avec un tremblement dans la voix, elle dit "Oh, ma pauvre!" et m'embrassa comme une soeur jumelle retrouvée.

Révéler mon propre secret si longtemps gardé m'effraya à mort, mais je sentis pourtant qu'un poids terrrible venait de se retirer de mes épaules, pour avoir finalement trouvé quelqu'un avec qui je pouvais être totalement honnête, à qui je n'avais pas à cacher la vérité. Je suis sûre qu'elle ressentait un mélange des mêmes émotions. Instantanément, nos liens d'amitié se serrèrent davantage et s'approfondirent, devenant plus proches de ceux qui existent entre les membres d'une même famille. Toutes les deux nous avions des larmes dans les yeux quand la porte s'ouvrit, et elle me demanda si je voulais bien parler encore un peu. J'acceptais, et nous allâmes dans sa chambre. Nous avons mis nos âmes à nu l'une l'autre pendant plus de deux heures. En dépit de nos environnements, de notre travail, de notre position sociale, nos situations personnelles étaient remarquablement semblables.

Nous avons parlé toutes les deux de notre désir d'être filles depuis nos plus anciens souvenirs; comment dans nos nuits d'enfants nous priions Dieu de nous éveiller filles le lendemain; comment, lorsque nous fûmes plus âgées, nous avions essayé de refuser notre vrai moi aussi longtemps et de tant de manières différentes; comment tant de gens semblaient avoir deviné que nous étions différentes et nous avaient mises à l'écart; comment notre premier pas vers notre propre reconnaissance fut ironiquement une autre déception, c'est à dire "d'admettre " que nous étions "TV" et comment, entrant dans la trentaine, nous avions finalement accepté la pleine réalité de nous-mêmes --le fait que notre identité de genre fût entièrement féminine, malgré même notre orientation sexuelle dirigée vers les autres femmes (certains nous désignent comme des "mâles lesbiens", bien que, personnellement je n'adopte pas ce terme parce que, en dépit du corps que j'habite, je ne suis pas un "mâle" quoi que ce soit.

Nous avons aussi parlé de ce que nous ne voyions pas d'espoir de pouvoir entamer une transition; parce que nous étions toutes les deux passionnément amoureuses de nos épouses, qui étaient toutes les deux (malheureusement) des femmes hétérosexuelles "normales" ayant besoin que nous continuions à être (ou, au moins, à, prétendre être) des HOMMES, aussi bien anatomiquement qu'en apparence. Nous reconnaissions toutes les deux que nos épouses luttaient vaillamment pour accepter notre travestisme et nous soutenir; le simple fait qu'elles n'étaient pas lesbiennes signifiait qu'il serait extrêmement improbable qu'elle soient jamais heureuses comme amantes et comme épouses si nous passions à la transition pour vivre en femmes à plein-temps et nous faisions opérer.

Comme la plupart des autres êtres humains, elles ont été conditionnées à s'attacher aux autres personnes en fonction de nos caractéristiques superficielles (physiques) plutôt que substantielles (spirituelles). Sans que cela soit de leur faute, nos épouses ne seraient certainement jamais capables d'accepter l'échange de leurs "maris" pour des "épouses"; aucun rapport avec leur amour pour nous et leur désir de nous voir heureuses.

Ce n'était tout simplement pas possible pour elles, tout comme ce n'était pas possible pour nous de sacrifier notre vie avec elles pour une transition --nous les aimions trop et même la joie d'une vie post-opératoire en accord avec notre vrai moi ne remplirait pas le vide que leur perte créerait dans nos vies, ni ne nous soulagerait du sentiment de culpabilité que nous ressentirions pour avoir blessé les personnes que nous aimions le plus au monde, et qui rendrait chacune aussi solitaire et misérable comme nous le serions si nous nous séparions d'elles.

Alors où en étions-nous, sinon prises au piège du statu-quo ? Je dis quelque chose comme je me sentais chanceuse de ne pas m'entirer aussi mal que je l'avais entendu ou appris de si nombreuses soeurs TS: J'avais une famille stable et aimante, un travail assuré et raisonnablement bien payé, et j'appréciais la plupart des aspects de ma vie, même si je devais le faire de beaucoup d'entre eux dans le rôle mâle que je détestais.

Oui, le désir d'être ouvertement moi-même tout le temps, et d'avoir l'anatomie d'une femme m'accompagnait chaque jour et chaque nuit, à chaque moment de rêve comme de veille. Cependant je n'étais pas dans l'angoisse psychologique constante et torturante habituellement décrite comme propre aux "TS pré-op".

Mon coeur appartient à celles de mes soeurs qui sont dans cette situation, parce que, par quelque miracle, j'étais raisonnablement contente de mon lot dans la vie, en dépit de ma propre douleur, considérable mais supportable.

Régulièrement, bien sûr, reviennent les temps où je crois ne plus pouvoir continuer de cette façon, vivant le mensonge; mais ces sentiments de désespoir passent forcément. Aussi longtemps que je peux trouver le réconfort dans les bras de la femme que j'aime, et aussi longtemps que subsiste ma foi en Dieu, je peux faire face au fardeau. Mon amie a été intriguée par la contradiction apparente entre le "désir constant" et la "satisfaction relative" que j'avais exprimés, et je dus essayer de lui expliquer maladroitement mon sentiment là-dessus. Je trouvai quelque chose de ce genre: Je sais que je suis en réalité une femme, que je l'ai toujours été et que je le serai toujours. Donc, cela n'a pas d'importance si je dois faire semblant d'être un homme --c'est simplement comme un rôle que je joue, comme si j'étais une actrice dans un film--, aussi longtemps que je peux m'échapper régulièrement de ce rôle en laissant apparaître le "vrai moi" aux réunions, groupes de soutien, sorties nocturnes, etc... Je peux être raisonnablement heureuse de mon lot dans la vie.

Avec les larmes qui lui coulaient le long du visage, elle me regarda et dit " Je ne peux pas dire que je suis une femme, mais je voudrais TELLEMENT en être une!" Je pris sa main comme elle pleurait, essayant désespérément de trouver un moyen de la réconforter, mais sans pouvoir trouver les mots. A ce moment-là, je n'avais jamais vraiment arrêté et examiné exactement pourquoi je sentais la voie à suivre -- ce qu'était ma "philosophie du Genre" -- et donc je ne pouvais pas l'expliquer de manière à aider quelqu'un d'autre.

Elle finit par se calmer, nous parlâmes encore un peu, puis nous nous dîmes adieu. Depuis, elle et moi avons partagé de nombreux bons moments ensemble, et nos liens d'amitié sont plus forts que jamais, mais je n'ai jamais oublié le caractère poignant de ce premier coeur-à-coeur. Je sentais sa douleur et son sentiment de désespoir si fortement, comme si cela avait été les miens. Cela me poussa à faire beaucoup d'introspection à ce sujet l'année dernière, jusqu'à découvrir comment j'avais trouvé un niveau acceptable de paix avec moi-même --et je suis maintenant capable d'aider les autres à le trouver aussi. Je me suis même forcée à reconsidérer si j'étais vraiment aussi heureuse que je le croyais. Je suis soulagé de m'être reconfirmée que je suis raisonnablement heureuse, sans aucun doute.

Mais comment expliquer ce contentement aux autres, comment partager et espérer le répandre chez mes soeurs ? Ca c'est un vrai défi. Je suis déterminée à essayer de tous mes efforts. Qu'est-ce qui fait d'un homme un homme, et d'une femme une femme ? Est-ce l'anatomie ? Les gènes ? Le conditionnement psychologique par l'expérience de la vie ? Les hormones ? La spiritualité (ou quelqu'autre intangible qualité encore indéfinie) ? Ou bien est-ce tout cela ensemble, ou une combinaison ?

Bien, examinons la question sous tous les angles, un à la fois et voyons si nous pouvons assembler les morceaux.

L'ANATOMIE? Non cela ne peut pas être la réponse. Les bébés garçons naissent avec les testicules non descendus, des pénis non développés, ce qui, dans les temps antérieurs à la génétique, pouvait les faire mal reconnaître et les faire élever comme des filles (un rêve de Transgenre devenu vrai ?). Cependant, avec la puberté leur virilité remontait à la surface et il devenait évident qu'ils étaient des mâles, en dépit de l'apparence de leurs organes génitaux.

De la même façon, des bébés filles sont nés avec des clitoris hypertophiés et des lévres partiellement soudées, qui provoqua leur identification et leur éducation comme garçons, mais là encore, à la puberté la vérité vint immanquablement à la lumière en dépit de leur anatomie externe. Bien que rarerement, il naît parfois dans le monde de vrais hermaphrodites qui possèdent l'appareil reproducteur de chaque sexe.

Cela les fait-il à la fois mâle et femelle ? Non. Ces conditions sont des anomalies foetales qui provoquent un développement anormal de l'appareil génital, mais les tests génétiques révèlent que chaque personne a un sexe génétique propre, et l'identité de genre et le comportement correspondent habituellement a ce sexe génétique (exactement comme il le fait chez les bébés avec des organes génitaux normaux). Et les hommes qui perdent ces organes à la suite d'accidents ou de maladie ? Et les femmes qui doivent subir une double mastectomie et des hystérectomies complètes ? Ces infortuné(e)s sont ils moins hommes ou moins femmes parce qu'ils deviennent anatomiquement neutres ? Bien sûr que non ! Notre genre n'est pas défini par notre anatomie physique --si c'était le cas, des choses telles que la dysphorie de genre et le transsexualisme ne pourraient pas exister. L'anatomie, donc, est ce que j'appelle une caractéristique "superficielle".

Qu'en-est il ensuite des GENES ? C'est ainsi, après tout, que la science moderne détermine le genre, à partir d'un point de vue strictement biologique. Les tests génétiques sont fondés sur la 23ième paire de chromosomes, c'est à dire XY mâle, et XX femelle. Les compétitions athlétiques internationales utilisent des tests génétiques pour s'assurer que les hommes génétiques ne concourrent pas (ce qui est considéré comme un avantage) dans des compétitions réservées aux athlètes femmes.. Ceci est une méthode infaillible parce que notre code génétique est immuable -- aucune dose d'hormones, aucune chirurgie, aucune psychiatrie ne peut l'afecter. Pré-op ou post-op, nous avons toujours génétiquement le même sexe que celui de notre naissance. La génétique doit-elle pour autant nécessairement nous dicter notre genre ? Encore une fois, la réponse est "Non", pour la même raison. Si c'était le cas, il n'y aurait pas de dysphorie de genre et le transsexualisme serait impossible.

Ainsi donc, la génétique (comme le dit le populaire) n'est PAS la destinée, et ne doit pas déterminer notre genre. La génétique est donc une autre caractéristique "superficielle".

Et le CONDITIONNEMENT PSYCHOLOGIQUE ? Pas de chance. De nombreuses et célébres figures trés viriles de l'histoire, nous le savons maintenant, ont été élevées comme des filles dans leur enfance (Oscar Wilde et Ernest Hemingway, pour en nommer deux --il semble que ce n'ait pas été une pratique si rare, surtout en Grande-Bretagne). Cependant, cette "féminisation" précoce de leurs jeunes et impressionnables esprits ne les a pas conduits à penser à eux-mêmes comme à des femmes. Non plus que la fille aînée dans une famille qui n'a pas de fils, et qui est obligé de tenir leur rôle en aidant le père dans les durs travaux manuels (dans une ferme, par exemple) n'apprend à penser à elle-même comme à un homme.

Quand les enfants grandissent, ils développent inévitablement une identification de genre conforme à leur sexe biologique, et assument le rôle de genre dans la société approprié à ce sexe. Les expériences de la vie peuvent pousser ces hommes à développer des fétiches sexuels incluant les vêtements de femmes, mais un tel fétiche n'est en aucun cas un indicateur d'une indentité de genre féminine.

Les Travestis Fétichistes ne pensent pas d'eux qu'ils sont des "femmes dans un corps d'homme" et non absolument AUCUN désir de se faire enlever leur appendice ! (En fait, ils en ont besoin pour apprécier leur fétiche, qui implique d'ordinaire la masturbation). Ces hommes sont juste cela --des hommes avec un fétiche, pas des Transgenres. [Je trouve intéressant que le fétichisme sexuel impliquant des vétements masculins soit à ma connaissance inconnu parmi les femmes --alors qu'il existe certainement des femmes TV, qui ne développent pas de passions sexuelles simplement du port de vétements d'hommes.

Ce type de fétichisme semble être une caractéristique exclusivement masculine. Aucune expérience de la vie ne masculinise l'identité de genre féminine d'un TS homme->femme. Beaucoup de TS d'âge moyen avouent qu'ils ont gaspillé du temps à vivre des aspirations considérées comme typiquement masculines (soldats, flics, pompiers, métiers du bâtiment, etc...)

Beaucoup ont fait tout ce qu'ils pouvaient pour faire d'eux des "hommes", y compris de la culture physique, du tatouage, l'imitation des caractéristiques du comportement "macho" et des années de psychothérapie --certaines ayant même droit aux thérapies d'aversion, aux traitements de choc, et à la psychopharmacologie (substances altérant l'esprit) -- rien de ques choses inutiles. A l'intérieur, ils sont toujours su qu'ils étaient des femmes, pas des hommes.

Leur identité de genre fondamentale de femme refusa obstinément de changer. Aucune, je dis bien AUCUNE n'a jamais été "guérie" de sa dysphorie de genre par une approche psychologique et aucune thérie psychologique ne colle aux nombreuses histoires des vies personnelles des TS. Il y a toujours eu de nombreuses exceptions vérifiables aux mécanismes psychologiques explicatifs proposés, et la psychothérapie seule a toujours failli à apporter la paix à l'esprit préoccupé et au coeur angoissé des personnes TS.

C'est pourquoi nous devons conclure que le conditionnement psychologique/l'expérience de la vie n'est pas la réponse non plus.

Et les HORMONES? Ici nous pouvons peut-être enfin avoir une partie importante de la réponse. Il existe une quantité croissante de preuves scientifiques selon lesquelles il y a des différences anatomiques (de forme) et physiologiques (fonctionnelles) entre des cerveaux normaux d'homme et de femme. Pour éviter une longue discussion technique (largement exposée dans de nombreux ouvrages sur le sujet, par exemple "Brain Sex"), il nous suffira de dire que non seulement certaines structures sont de tailles différentes chez l'homme et la femme, mais que les cerveaux d'hommes et de femmes fonctionnent réllement de façon différente.

Les Hommes et les Femmes "pensent" réllement différemment, ce qui explique leurs différences de réactions et la difficulté de comprendre le comportement du sexe oppos&eacutE;. Quant à moi, comme beaucoup de TS homme->femme, je soupçonne de comprendre les femmes parfaitement -- ce sont les hommes que j'ai du mal à saisir ! [Bien que je doive admettre que le livre "Les Hommes viennent de Mars, Les Femmes de Vénus" m'a été d'un grand secours pour comprendre le Néanderthalien poilu, soit dit sans offense. Une fois que vous avez compris ce concept du besoin de la "caverne" de la part du mâle (tel que décrit dans l'ouvrage), vous verrez que le terme de "néanderthalien" est approprié quand il est utilisé avec humour. Je le recommande fortement (le livre, pas le "temps de séjour dans la caverne": Nous autres filles n'avons pas de grands besoins en la matière)] Pourquoi donc les cerveaux de l'homme et de la femme sont ils si différents ? Il existe une preuve irréfutable que la formation de notre cerveau en tant que "mâle" ou "femelle" est directement conditionné par le niveau d'hormones reçu quand nous sommes dans le sein maternel.

C'est là encore un sujet technique mais il peut se résumer ainsi: dè que notre cerveau se développe suivant des caractéristiques féminines, par exemple, il fonctionnera toujours comme le cerveau d'une femme génétique normale --même si vous êtes en fait un mâle génétique. Lhypotèse opposée (cerveau masculinisé pour un foetus génétiquement féminin) peut se produire aussi.

Cependant, des hormones administrées après la naissance (après que le cerveau a été pleinement formé) n'auront aucun effet. L'administration d'homones mâles ne peut pas "guérir" une personne TS homme->femme de sa conviction qu'elle est une femme, ou de son désir d'opération en conséquence. Une thérapie d'hormones femelles peut produite le développement de caractéristiques sexuelles secondaires féminines chez le mâle génétique (petite croissance de la poitrine, redistribution des graisses dans le corps, texture de la peau, et quelquefois sauts émotionnels), et la même chose est valable pour les hormones mâles administrées aux femmes génétiques (voix plus grave, augmentation de la masse musculaire, croissance de la pilosité du visage et du corps [Beurk!]), mais sans altérer l'identité de genre.

On s'essaya, et on échoua, pendant la Deuxième Guerre Mondiale, à diminuer les tendances agressives de Hitler en saupoudrant sa nourriture d'hormones femelles pendant presque deux ans ! Il est évident que cela ne donna pas les effets recherchés (bien que Eva Braun puisse avoir été intriguée par les changements physiques qu'elle pourrait avoir remarqués). Ainsi, alors que les hormones foetales peuvent réellement former le "genre" du cerveau, il est clair que les niveaux hormonaux de l'adulte ne nous dictent pas notre identité de genre.

Une fois que votre cerveau est "féminisé" ou "masculinisé" dans l'utérus, vous êtes coincé avec pour le reste de votre vie; qu'il corresponde à votre sexe génétique ou pas. Les hormones sont une partie, mais pas la totalité, de la réponse.

Maintenant, comment donc pourrions-nous alors caractériser les genres ? Je soumets à votre réflexion ce que je vois comme la seule conclusion possible: Ce qui fait d'une femme une femme et d'un homme un homme, sans s'en tenir à notre matériel génétique, hormonal ou anatomique, c'est notre spiritualité notre âme. J'ai l'âme d'une femme. Génétiquement, je serai toujours un homme.

C'est ce QUE je suis Anatomiquement, et même la meilleure chirurgie ne pourrait que faire de moi un neutre, pas une femme. Mais mentalement, émotivement et spirituellement; j'ai toujours été et je serai toujours une femme sans considération pour mon apparence physique ou mon rôle de genre dans la société. Une femme, c'est QUI je suis. Ceux qui ne croient pas à l'âme (ou à la spiritualité à la religion, ou à quoi que ce soit qui puissent correspondre à ce concept), et ceux qui préfèrent simplement parler en termes strictement scientifiques, peuvent extrapoler à partir du développement de mon cerveau foetal sous l'influence des homones. Peu importe la manière dont vous vous le représentez, le point important est celui-ci: mon corps physique, mon apparence, mes vétements, mon rôle dans la vie --toutes ces choses sont des caractéristiques superficielles (physiques).

Mes caractéristiques substantielles (ce que j'appelle spirituelles) sont celles qui définissent l'essence de ce que je suis --mon esprit, mes pensées, mon âme -- qui définissent qui je suis. Je suis Angela, et Angela est une femme. Toutes les caractéristiques superficielles ne sont rien de plus qu'une façade que je présente au monde, un masque que je porte pour me protéger moi et les autres, et les mettre à l'aise. Chaque soeur homme->femme TS qui n'envisage pas l'opération a ses propres raisons de porter ce masque.

Mais bien qu'un homme [normal] soit [toujours plus ou moins] ce qu'il est forcé d'être (ou d'apparaître), ce n'est pas ce que nous sommes. Ce que nous sommes, ce sont des FEMMES, et nous le serons toujours. Nous sommes des actrices jouant le rôle d'hommes pour protéger les gens et les choses que nous aimons. Et malgré cela; nous sommes toujours des femmes. A condition de toujours garder qui nous sommes en tête, il n'est pas insupportable de continuer à faire semblant d'être ce que nous sommes supposées être. Aucun problème quant à la virilité que nous devons montrer en public, au fond de nous mêmes nous savons que nous sommes toujours des femmes. Rien ne peut changer cela.; RIEN ne peut nous prendre notre féminité naturelle.

Nouis pouvons relever la tête, sachant que nous réussirons à porter un fardeau qui dépasse les forces de beaucoup de femmes génétiques (et aussi de beaucoup d'homme non-transgenres); non parce que nous sommes supérieures de quelque façon (nous ne le sommes pas), mais simplement parce que nous aimons si profondément --aimons ceux qui nous aiment, ceux que nous voulons protéger à tout prix; et, tout aussi important, nous aimons nous-mêmes). C'est cela la clef --savoir que notre sacrifice de jouer un rôle que nous détestons est de l'amour pour autrui, et l'apprentissage de l'amour de nous-mêmes pour juste ce que nous sommes, en dépit de notre coeur meurtri. S'il vous plaît ne vous méprenez pas. Je ne suis pas en train de vous peindre une image à l'eau de rose d'une satisfaction béate dans nos dilemmes, mais bien plutôt une satisfaction relative et la paix qui vient de la connaissance de vous-même --votre vrai moi --la très REELLE femme qui existe dans la coquille d'homme.

Bien que cela semble contradictoire, vous devez combattre pour obtenir cette satisfaction --exactement comme un alpiniste lutte pour atteindre quelques moments d'euphorie au sommet de la montagne Même au sommet, la sérénité peut s'évanouir rapidement -vous devez lutter contre le vents et les éléments -- mais dans les périodes de calme la sérénité revient avec la pleine satisfaction de l'accomplissement différé.

Je rêverai toujours d'une transition. Je veux des seins et un vagin, pas des testicules et un penis. Je veux pouvoir "passer" en bikini et même nue, pas seulement avec plein de vêtements. Je veux faire l'amour avec ma femme comme une femme le fait avec une autre femme, pas comme le lui fait un homme. Mais je sais que ces choses n'ont pas de raison d'être pour moi. ma femme, la femme que j'aime plus que la vie elle-même, est une femme hétérosexuelle qui a besoin de moi en tant qu'"homme". Je vais donc essayer d'être le meilleur "homme" que je puisse être.

Au plus profond de moi, je suis certaine qu'elle sait aussi bien que moi que je suis en fait une femme quoi que je fasse; mais en toute probabilité, le meilleur compromis que nous puissions faire est pour moi d'agir comme un homme, au moins en partie. Cela est possible, parce que j'ai fait la paix avec mon moi intérieur. Vous le pouvez aussi.

Il y a des sources d'aide, des coups de main qui vous aident à monter à la conquête de vous-même. Une personne que vous aimez et qui vous aime en retour est d'une aide incroyable. Son amour est une corde que vous vous acrochez à la ceinture --ça ne vous aide peut-être pas tellement à monter (moins qu'un encouragement moral), mais ça vous empêche de tomber. Même si vous n'avez pas encore trouvé cet amour "spécial", il y en a d'autres: la famille, les amis, même ceux qui ne connaissent pas votre "moi" réel, peuvent vous prodiguer du réconfort, souvent sans le savoir, juste en étant là pour partager un aspect important de votre vie.

Si vous voyez assez loin, voulez maîtriser votre peur, croire en l'amour de ceux que vous aimez et acceptez le risque d'un rejet, tôt ou tard vous trouverez certainement quelqu'un de qui prendre soin qui pourra accepter la connaissance de votre vrai moi, même si elle ne la comprend pas totalement. Vous devez être patiente, et approcher doucement et prudemment, pour gagner cette acceptation. Pas de famille ni d'amis proches ? N'oubliez pas vos soeurs dans les divers groupes de soutien. Nous vous comprendrons certainement, et nous vous donnerons tout l'amour et le soutien que nous pouvons parce que nous sommes vos soeurs, en esprit.

Venez nous connaître, et vous vous sentirez avec nous de mieux en mieux. S'il vous plaît, ne soyez pas effrayée de vous confier à nous quand vous en éprouvez le besoin. Bien entendu, vous pouvez aussi désirer nous en dire le moins possible, comme vous voulez. C'est une rue à double-sens et nous pouvons toutes avoir besoin d'une petite assistance par extraordinaire de temps en temps. C'est ce qu'est notre sororité (et je ne parle pas seulement de Tri-Ess, mais aussi de tous les autres merveilleux groupes de soutien qui existent dans la communauté Transgenre).

Nous sommes toutes ensemble dans le même bateau. Venez aux réunions de groupes. Trouvez le moyen de venir. Vous le pouvez. Vous le DEVEZ. Vous n'avez pas à lutter seule, et vous ne devriez pas subir votre fardeau de cette façon.

Finalement, s'il vous plaît, discutez de spiritualité que vous soyez religieuse ou non. Il EXISTE un "Dieu", une "Puissance Suprême", un "Créateur", une "Force de l'Univers" ou quelque chose qui L'incarne. Toutes celles qui ont la Foi, toutes celles qui croient dans quelque chose de plus grand qu'elles-mêmes et que ce monde, toutes celles qui prient et comptent sur une Puissance bienveillante sont accordées avec la plus grande source d'Amour, de Réconfort, de Pardon, de Compassion et d'Espoir qui existe. Personnellement, je suis Chrétienne (Catholique Romaine), mais sans considérer nos croyances individuelles ou nos étiquettes, tous les êtres humains (et de fait l'Univers lui-même) ont été créés par cette vraie Puissance --appelée de divers noms et adorée de différentes manières, mais toujours unique.

J'utilise ce terme de "Dieu" de façon générique, mais sentez-vous libre d'y substituer n'importe quel euphémisme à votre convenance. "Dieu" vous aime, juste comme vous êtes, juste comme il vous a faite. "Dieu"vous aidera à trouver la paix intérieure si vous le lui demandez et si vous croyez en Lui. Cela ne signifie pas que vous ne deviez pas chercher la Transition si les circonstances l'autorisent. Si vous satisfaites aux critères exigés, en avez les ressources, n'ˆtes pas découragée par votre famille ou d'autres personnes concernées, et si c'est ce que vous voulez vraiment, alors, faites vous opérer et , croyez-moi, celles d'entre-nous qui ne peuvent pas faire la transition vous encourageront et vous aideront de toutes les façons possibles (bien que nous vous envierons). Bref, ce que je suis en train de dire est que c'est parfait si vous voulez la transition, mais pas pour n'importe quelle raison.

Vous êtes toujours une être humain unique et de valeur, une âme importante et adorable; une femme dans toutes acceptions significatives du terme. Ne laissez pas les règles superficielles diriger votre conecption du moi: Connaissez-le et acceptez-le --soyez honnête et loyale envers vous-même -recherchez l'aide et le soutien de "Dieu" et des autres personnes, et spécialement des personnes qui vous aiment et de vos soeurs Transgenre; aimez sans condition et autorisez les autres à vous aimer à leur façon, sans l'exiger; ne soyez pas déprimée de vous-même, et jamais, au grand JAMAIS, n'ayez honte de ce que vous êtes.

Vous êtes une femme, et vous êtes belle pour ce qui compte le plus: dans votre âme. Laissez votre âme féminine briller et transcender votre corps et votre vie quotidienne. Quelque chemin que suive votre vie, quoique vous choisissiez ou soyez contrainte d'être vous servez toujours QUI vous êtes. Ce que vous êtes n'est pas important du tout. A toutes mes soeurs qui plient sous le fardeau, partout, ma prière est paix, amour et bonheur.

Elles vous attendent, si vous les cherchez. Puissiez vous les trouver bientôt.

©Tapestry Journal Electronic, 1996

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